Comment bien se concentrer ?
« Nombreux sont ceux qui pensent à distraire leur esprit, rares sont ceux qui songent à le concentrer ». - Anonyme
La concentration consiste à retenir et focaliser son attention sur un objet physique ou abstrait. Elle est d'autant plus efficace si nous la mobilisons rapidement. Voyons quelques aspects cognitifs de la concentration. Comme souvent, des choses simples se révèlent efficaces.
Par exemple, que faisons-nous en arrivant au travail le matin ? Il peut évidemment y avoir de petits rituels de mise en condition, comme des salutations ou la préparation de la journée, gobelet de café à la main.
L'important est de maîtriser ces éléments et de bien définir le « top départ » de nos activités. Il est aisé de comprendre que si nous commençons à rêvasser ou à regarder plus ou moins intentionnellement ce qui se passe autour de nous, nous nous exposons à la dispersion.
Comment exercer sa concentration ?
Pour commencer, peut-être voudrez-vous vous tester ou bien vous entraîner à la concentration. Voici, pour « mise en jambes » quelques exercices faciles à mettre en œuvre.
Fixez intensément un objet à proximité pendant deux ou trois minutes. Soyez surtout très attentif à ce qu'aucune autre idée ne vienne parasiter votre concentration. Ensuite, vous pouvez corser l'exercice en détournant le regard et en vous appliquant à vous remémorer exactement les contours, formes et détails de l'objet. L'exercice est simple, mais pas si facile.
Également, comptez à rebours à partir de 100 (ou plus). Faites ensuite la même chose mais de deux en deux, ou de trois en trois, quatre en quatre, etc. En vous plaçant dans un environnement relativement bruyant, vous augmentez la difficulté. Assurez-vous toutefois que personne ne se méprenne sur ce qui semblera alors être une profonde rêverie ! Ce serait dommage, et à l'opposé du mérite de vos efforts. Ces exercices réclament une certaine dose d'énergie.
Forts de ces préparations et informations, nous pourrions nous sentir capables de travaux grandioses. Pourquoi pas, mais il faut tenir compte aussi d'une réalité : nous ne sommes pas des machines. En d'autres termes, nous sommes soumis aux contraintes physiques et physiologiques entraînant la fatigue. Il ne s'agit pas forcément de s'effondrer mais tout au moins d'avoir des phases de « creux ».
« On peut être attentif pendant environ 45 minutes d'affilée ».
Nos capacités de concentration sont variables selon la tâche et selon la durée. On admet que nous pouvons soutenir efficacement un effort de concentration pendant des phases d'environ 35 à 45 minutes. Au-delà de cette limite, notre cerveau, grand consommateur d'énergie, aura besoin cette fois d'une phase de récupération. Pendant celle-ci, il est beaucoup moins disponible. On cherchera donc à alterner les temps forts et les temps faibles. Si nous n'avons pas le choix, il faudra juste se souvenir que nous ne sommes pas dans les meilleures conditions de travail et en tenir compte selon l'enjeu.
Dans la pratique, comment procéder ? Céline Lemercier, spécialiste toulousaine, explique : « Lorsque l'on a une longue tâche à réaliser, mieux vaut ainsi travailler une demi-heure, puis prendre quelques minutes de repos, retravailler une demi-heure et ainsi de suite jusqu'à ce qu'elle soit achevée. Cette phase de repos n'a pas besoin d'être longue, entre 1 et 5 minutes suffisent ».
On cherchera donc à segmenter l'activité par des « charnières » de récupération. Vos attention et concentration ne s'en porteront que mieux. Pourquoi pas prendre une boisson, préférentiellement de l'eau, grignoter quelque chose diététiquement recevable, se déplacer dans un autre bureau, marcher quelques instants, respirer. Et non, nous ne vous invitons pas à fumer...
La concentration, une question de temps et de méthode
Peut-être pas le meilleur moment pour se concentrer...
Nous venons de parler des périodes successives de disponibilité mentale. Gérer leur alternance peut déjà améliorer des choses. D'autres aspects sont également à prendre en compte en matière de temps. Il s'agit des considérations chronobiologiques. Qu'est-ce à dire ? Qu'il y a des moments dans la journée plus favorables que d'autres pour entreprendre telle ou telle activité.
Notre chercheuse précise : « Les meilleurs moments pour mobiliser son attention sont le matin de 10h à 12h et l'après-midi de 16h à 18h. Il faut en revanche éviter le début d'après-midi ». Ce début d'après-midi, en effet, est une période où notre corps, en dépression physiologique, baisse un peu en température. C'est une période creuse systématique.
On pense souvent que c'est uniquement dû au repas. Pas précisément, car même en mangeant très léger, le phénomène se produira. Évidemment, si vous reprenez trois fois du cassoulet, ça n'arrangera rien... On peut conclure de ce qui précède que certaines tâches assez importantes, comme organiser une réunion, se trouveront bien placées plutôt le matin ou en fin d'après-midi. Les attentions respectives ont de plus fortes chances d'être alors relativement disponibles.
Dans certaines circonstances, rester concentré devient difficile. Journée chargée, fatigue, préoccupations, l'esprit cherche à s'échapper. Si en plus de cela vous devez absolument assister à une réunion aux accents soporifiques, cela vire au fardeau. Que faire ? Transformer l'écoute passive en écoute active. Il s'agit de rester actif sur le traitement de l'information.
« Les meilleurs moments (...) sont le matin de 10h à 12h et l'après-midi de 16h à 18h ».
Prenez des notes et cherchez à reformuler ce qui est exposé. Synthétisez les données en vos propres termes qui construisent des phrases nouvelles et plus courtes. Ne notez donc pas mot à mot, repérer les idées clefs vraiment utiles au développement. Vos notes n'en seront que plus claires et digestes. Et plus faciles à réviser et mémoriser.
Éventuellement, insérez des schémas, voire uniquement. Créez des associations graphiques simplifiées selon le rapport logique qui les associe. C'est le principe du schéma heuristique, parfois appelé carte mentale.
Posez-vous des questions et répondez-y. Quel rapport avec mes activités ? Quels sont les liens logiques entre les parties ? Comment puis-utiliser ce que j'apprends ? Etc.
Des générations multi-tâches ?
Tout faire en même temps ?
On entend beaucoup de choses à propos de l'exécution de plusieurs tâches en même temps. Certains affirment qu'ils restent efficaces malgré une attention à distribuer dans plusieurs directions.
D'autres ont même avancé que les jeunes générations, « nées avec les nouvelles technologies », ont déjà suffisamment « évolué » pour être capables de gérer plusieurs activités mentales en même temps. Qu'en est-il en réalité ?
Il devient urgent de rappeler que notre mémoire est une fonction fondamentalement indispensable à notre existence et développement.
Quel est le véritable enjeu quant à notre mémoire ? >> En savoir plus...
« Si l'on [fait] deux choses en même temps, notre efficacité [est] moindre sur au moins l'une des deux, [même si (...)] on reconnaît que c'est possible (faire deux choses en même temps) si l'une des deux tâches a été automatisée. Mais, en contre-exemple, envoyer un mail tout en écoutant son chef, sans détériorer au moins l'une des deux tâches, n'est pas possible », continue Céline Lemercier, à cause d'une trop forte concurrence des tâches, verbales en l'occurrence.
Prudence Fourcade, dans son mémoire de master MEEF, L’attention et la concentration au coeur des apprentissages, explique et résume très bien les conclusions de plusieurs études à ce propos : « Les nouvelles technologies ont également créé un mode de fonctionnement que j’appellerai multi-tâche. Il consiste à mener plusieurs actions simultanément, ce qui a pour effet de diviser l’attention (c'est nous qui soulignons). Dans ces conditions, chaque tâche est menée de façon plus ou moins superficielle, et il est difficile, voire impossible, de se concentrer efficacement sur une seule d’entre elles. »
Plus la similarité de fonction est proche, plus il sera difficile de rendre les actions indépendantes. Se concentrer sur un texte en écoutant des chansons dans une langue que l'on comprend est déjà très perturbant. La même chose sur fond de musique classique est plus facile, bien qu'il y ait tout de même déjà une déperdition d'attention.
Et surtout, éliminez les causes de distraction : volet qui claque, robinet qui coule, chaise bancale, inconfort, bruit... Ainsi que discussion, musique ou chanson parasite, sollicitations diverses et « urgentes ». Un téléphone portable non éteint, même en silencieux, est déjà une source de distraction. Pourrez-vous réellement oublier (d'où distraction) qu'il est là... ? Résisterez-vous longtemps à finalement vérifier ses notifications ?
On peut améliorer sa concentration avec un peu d'application et quelques exercices. En choisissant bien son moment et en limitant les causes de distraction. Finalement, il suffit d'y faire attention.
Frédéric Huguenin